(La lettre est striée de nombreuses ratures et d'autres annotations gribouillées dans les marges)

Ma chère Jodie,

Tu es tout à fait en droit de te demander pourquoi il n'y a qu'aujourd'hui que tu reçois une lettre signée de mon nom. Je sais bien que je n'ai pas répondu à celles que tu m'as envoyées en Norvège. D'ailleurs, je me suis toujours demandé : comment as-tu eu l'adresse ? Tu as demandé à mes parents ? Bref, toujours est-il que je n'ai jamais trop su quoi répondre à tes reproches remarques à mon égard. J'ai conscience d'être parti au moment où tu avais besoin de moi, et il est normal qu'en tant qu'amie tu m'en tiennes rigueur. Ces lettres ne m'ont évidemment pas spécialement fait plaisir, et c'est vrai que ça a été un peu puéril de bouder plutôt que de m'excuser pour seule réaction. Seulement, j'ai eu mes propres trucs et... Dire que ça m'est sorti de la tête est assez honteux mais vrai. Ou alors je n'ai pas voulu le voir ? Je ne sais pas. Je me suis mal comporté, je sais. Mais— je suis revenu et j'imag(une longue tâche d'encre recouvre la fin de la phrase)

... Pardon, je mange en écrivant et j'ai renversé la bouteille d'encre. Je disais que j'imagine bien que tu ne veux pas entendre parler de moi pour le moment, mais j'aimerais qu'on fasse la paix, et qu'on redevienne amis, comme avant. Et si pour ça il faut que j'aille casser le nez de Mark, même deux ans après, je suis volontaire !
S'il te plaît, réponds-moi, même pour m'engueuler.

Désolé aussi de la saleté de cette lettre, mais ça va être la quatrième fois que je la réécris ; toi et moi savons bien que ça n'a jamais été mon fort.

Porte-toi bien,
Ton ami Montag.

Jodie,

Ce n'est pas grave pour la beuglante. Je crois que je m'y attendais un peu, même si ça surprend au petit-déjeuner. Je ne peux pas non plus dire que je ne l'ai pas méritée, en effet.

Je n'ai jamais voulu te faire de mal, et maintenant que je suis face aux faits, je me sens très coupable. Jodie, je ne t'ai jamais considérée comme moins qu'une amie, et je n'ai jamais voulu t'éloigner de moi, ni t'ignorer. Tout ce que j'ai pu faire, ça n'a jamais été contre personne, et certainement pas toi. Je ne sais pas comment l'expliquer... C'est une espèce de niveau supérieur d'égoïsme. Je ne suis pas parti parce que je pensais être seul, je suis parti parce que je voulais partir. Je ne me suis pas cherché une nouvelle vie en Norvège ; je pense que le mot « fuir » est le plus approprié. Je n'ai pas ruminé ma solitude, en pensant que je manquais d'amis, que je manquais d'amour, que je n'avais personne à mes côtés, à qui m'adresser. Ce n'était pas quelque chose de réfléchi, Jodie, c'était simplement une impulsivité d'enfant qui m'a dit un beau matin « Pars », et je suis parti.

C'est par égoïsme que je suis parti, par égoïsme que j'ai ignoré tes lettres, et par égoïsme que je suis revenu. Rien que de l'égoïsme. Pas de rancœur, simplement cette envie de m'isoler, de partir, de ne me préoccuper que de ma petite personne. Je ne sais pas trop ce qui m'a pris. C'est encore un peu flou dans ma tête, à vrai dire. Plus égoïste encore : je ne regrette pas d'être parti. Je culpabilise, mais je l'aurais fait quand même. Sauf que j'aurais répondu à tes lettres si j'avais su... Mais je serais quand même allé en Norvège. Besoin de changer d'air, en fait, je crois.

Je sais bien que tout ça ne joue pas en faveur de l'argument du « Je le referai plus, je te jure », mais je veux au moins que tu comprennes que je n'ai jamais rien fait contre toi, mais plutôt pour moi. Tu as toujours compté à mes yeux comme une amie extrêmement précieuse, et je ne me serai jamais permis de te faire délibérément du mal — même si de toute évidence, j'ai très bien réussi à le faire sans le rechercher. Mais j'ai les idées claires, maintenant, et effectivement, je ne repartirai pas comme un voleur, crois-le ou non. J'ai changé. Je crois.

Désolé encore si la lettre est peu soignée, mais je me suis mieux appliqué que l'autre fois. Je ne sais plus trop comment je dois signer. Envoie-moi une lettre si tu veux qu'on en reparle.
Montag.

Ma Jodie,

Parce que c'est noël et que j'ai toujours tendance à vouloir te rendre heureuse, j'ai décidé de t'offrir pour noël quelque chose que tu ne cesses de me demander : des babas au rhum et un gâteau au chocolat et au whisky. A consommer avec modération bien entendu !
Je me suis aussi permis de t'acheter un vernis à ongle couleur pieuvre, il ne me semble pas en avoir vu la dernière fois dans ton armoire et comme je sais que tu les collectionnes... J'ai gardé le ticket de caisse au cas ou cela ne te plairait pas.

Je te fais plein de bisous.
Passe de bonnes fêtes.

Ton Clément.

NE ME HAIS PAS.
Je t'en prie ne me hais pas.
Je n'avais pas vu ta lettre de Noël jusqu'à ce que je regarde derrière le volet que je n'ouvre jamais parce que je ne sais pas pourquoi ton hibou a eu l'idée de la mettre là.
Non, en fait, je n'ai pas d'excuse. Même sans voir la lettre j'aurais dû t'envoyer une lettre. Je l'ai fait, en fait, mais Gilda l'a """"perdue"""". Ce n'est pas un mensonge.
Donc, ne me hais pas. S'il te plaît.
Enfin si tu peux. Je suis chiant. A l'ouest. Et je sais pas m'occuper des personnes qui me supportent. Franchement je pue, tu peux le dire, tu le diras de toute façon. (Par contre je pue vraiment ? Niveau odeur je veux dire ? Ça m'a toujours tourmenté.)

J'ai essayé de t'écrire toute la journée mais j'ai tout simplement pas réussi à m'asseoir devant ma chaise et me dire que j'avais réussi à merder comme ça. Maintenant j'y arrive mieux mais évidemment tu vas recevoir ça demain matin et ça sera même plus la Saint-Valentin, sauf si Gilda se dépêche, ce dont je DOUTE parce qu'elle SAIT me mettre dans la merde. Je t'ai dit qu'elle avait perdu mes CVs ? Non ? Saloperie.
Enfin je l'aime quand même.
J't'aime aussi. T'es gentille, adorable même, t'es une crème. Et puis t'es jolie. Et tu sais ton ex là ? Bah c'est un gros con. Voilà. Il sait pas ce qu'il perd. J'aurais pas dû parler de lui mais : gros con que c'est. Comme moi. Mais quand même ! Pas pareil, si ? Non ?
Bref, t'es parfaite, oublie pas. Enfin je te fais pas une déclaration d'amour, haha, déclaration d'amitié quoi. Pour la Saint-Noël. Le Noëlentin. Noëlentin c'est carrément plus cool comme nom en fait...

Si un jour tu me laisses une énième chance de me rattraper que je ne mérite pas, dis-moi.
J'suis désolé de t'écrire pété comme un coing mais j'arrivais pas sinon. Avec la honte tout ça. Au moins je pleure pas quand je suis bourré donc c'est déjà ça. Pour le moment.

Bon. J't'aime. Dors bien.

Montag

Chère Jodie,

Aujourd'hui est juste un prétexte pour t'écrire, car pour des raisons évidentes et malgré les cheveux roux je pense qu'il n'y aura jamais rien entre nous. Quel drame. Bref, je voulais te souhaiter une bonne journée, de Saint-Valentin ou même de journée ordinaire. Comme cela fait plusieurs jours que je ne t'ai pas vu, j'espère que tu vas bien. Si j'apprends que c'est parce que tu as eu des ennuis avec des Aurors je vais me fâcher.

Prends soin de toi.
Lawrence.
(Je n'ai toujours pas oublié pour la crème.)

Viens, on s'en va au Népal se faire percer des trous dans les oreilles, en Laponie traquer le père-noël et kidnapper Rudolphe ou bien on échoue sur une île du Pacifique pour créer une nouvelle civilisation. Sachant que techniquement on sera les deux seuls membres donc ça va pas durer longtemps… Enfin, je veux bien faire un effort et devenir hétéro juste pour le bien de l'Humanité.

Je t'aime Jodie, tu dois être la meilleure amie au monde et quand le vin parle, il a toujours raison. J'adore ces moments que l'on passe à deux, on oublie tous nos problèmes c'est pas compliqué. Alors pour les prochaines vacances que tu peux avoir, prends tes valises et on transplane pour un pays chaud avec des cocotiers et du jus de papaye. Je suis certain que l'on peut trouver un sort pour que tu ne rougisses pas comme une écrevisse en plein soleil.

Sinon j'espère que tu as passé une bonne soirée de Saint-Valentin, bien accompagnée. Si non, dis-toi que c'est parce que t'es trop parfaite et que les hommes sont aveuglés par ta beauté. Vérité.

Je t'embrasse très fort ma rousse.
Peeter.

Jodie,

Je te remercierai de ne pas faire remonter à la surface des souvenirs aussi pénibles. Et puis, franchement c'est extrêmement dérangeant tous ces surnoms ridicules.

Qu'est-ce que vous avez tous à vouloir me conseiller à propos de Clément ! (oui, j'ai très bien compris tes sous-entendus. Je ne suis pas idiot) A toi je ne peux pas te mentir, même si ce n'est pas peine d'avoir essayé de te faire passer cette confession pour un égarement… un malheureux égarement. Je crois que je devrais te remercier, donc. Alors merci. Bien que je peux très bien m'en sortir tout seul. Et de toute manière je ne compte pas faire grand-chose de neuf, nous venons tout juste de nous réconcilier et… ah je n'est pas besoin de t'étaler tous les détails. Je te souhaite un Happy Valentine… tu le mérites.


Anselme N. Alwell.

PS ; Ces chocolats sont immondes. [on voit des tâches de chocolats au dos de la lettres. Preuve du mensonge honteux de Anselme]