« Alice on ne mange pas avec les mains ! » Je regardais mon père tandis que j'avais la bouche ouverte pour avaler mon repas. Je détestais me servir des couverts mais vu la tête qu'il tirait, je n'avais pas le choix. Je soupirais avant de prendre ma fourchette et je jouais avec la nourriture dans mon assiette. C'était le jour de mon anniversaire, j'avais huit ans et pourtant je n'avais le droit de rien faire. Non, aucun liberté. Ne pose pas tes coudes sur la table, tiens-toi droite, ne cours pas dans la maison. Toutes ces règles étaient indignes. Je boudais jusqu'à ce que l'on me pose mes cadeaux devant moi. A ce moment là j'avais les yeux qui pétillaient. J'étais la dernière de la famille. Devant moi, un frère ainé. J'ouvris mes cadeaux à très grande vitesse. J'étais contente, très contente. J'avais eu tout ce que je voulais donc une peluche qui volait. C'était trop la classe, un poney en peluche qui volait ! On aurait pu dire que j'étais une gamine pourrie gâtée car j'avais tout ce que je demandais. J'étais la petite princesse de la maison. J'avais un grand frère adorable, un père assez strict et une mère qui en voyait en moi la fille parfaite. Oui, j'aimais ma vie de famille. Je sautais de ma chaise. « Où tu vas jeune fille ? » « Jouer avec le poney volant ! » Fis-je avec des yeux pleins d'étoiles d'excitation. « Nous n'avons pas fini de déjeuner. » Les larmes me montaient aux yeux, j'allais à côté de mon père en le regardant, les yeux pleins de larmes. « S'il te plait... » Fis-je avec une moue toute mignonne. Je savais comment le faire craquer. « Pour une fois, c'est son anniversaire. » J'aimais ma mère, toujours là quand il fallait ! « Bon, très bien. C'est exceptionnel ! » D'un seul coup, mes larmes disparurent, quel talent pour la comédie ! Je pris tous mes cadeaux ainsi que le poney volant et je courus en direction de ma chambre. « ON NE COURS PAS ! »

Charlie est parti à Poudlard. C'était quelques mois après mon anniversaire. Je ne savais pas pourquoi mais une partie de moi lui en voulait. J'étais jalouse. Jalouse de cette foutue lettre qui était arrivée. Frustrée quand j'ai vu ce sourire sur ses lèvres. Je serrais ma peluche contre moi, mon poney volant. Je n'avais que huit ans mais je lui en voulais de partir comme ça. « Charlie a été envoyé à Serdaigle. » Je vis un ton déçu dans la voix de mon père. Il laissa tomber la lettre sur la table alors qu'il prit la Gazette des Sorciers en main. Je mangeais tranquillement mes tartines. Cette nouvelle avait l'air de ne pas les réjouir. Je ne comprenais pas pourquoi. « Alice, tu me feras le plaisir d'aller à Serpentard. » « C'est quoi Serpentard ? » Je connaissais juste le mot serpent dedans. J'espérais que ce ne soit pas un lieu où l'on cohabitait avec des pythons et des cobras... Très peu pour moi. J'étais une vraie peureuse en vrai même si je clamais haut et fort que j'étais la fille la plus courageuse sur terre. Il ne répondit pas et cela me fit peur. J'appris par le soir même que c'était des maisons, des dortoirs quand on allait à Poudlard. « On dort avec des serpents ? » Ma mère rit avant d'éteindre la lumière de ma chambre. Je ne dormis pas cette nuit là. Je ne savais pas si c'était un rire rassurant. Je serrais le poney volant contre moi. Charlie revint pour Noël, en arrivant je l'ai snobé comme ce n'était pas permis. « Alice ? Tu fais quoi ? » Je ne le regardais même pas, concentrée à jouer avec mes poupées. « Rien qui ne te concerne. » Huit ans et déjà un sacré sens de la repartie. « Pourquoi tu boudes ? » Je n'ai pas répondu, faisant comme s'il n'existait pas.

« Serpentard ! » Un grand sourire s'afficha sur mes lèvres avant que je n'aille rejoindre ma table. J'étais à serpentard, comme mon père l'avait voulu. J'étais très fière. Le buffet était incroyable. Cet endroit était incroyable. Je sentais que j'allais me plaire ici. Je courais dans les couloirs, ayant peur d'être en retard. Je voulais être la fille parfaite, l'élève modèle en somme. Qu'on me dise que ce que je faisais était bien. J'avais onze ans. J'arrivais pile pour le premier cours de métamorphoses. J'avais tenté de bien faire, mais je n'y arrivais pas. Je sentais les larmes perler au coin de mes yeux. « Bouuuuhh la gamine elle pleure ! » Je regardais mon binôme d'un air furieux. Un sale gryffondor qui se vantait d'être le garçon le plus beau du monde. Je lui mis un coup de coude entre les côtes. « On ne traite pas une demoiselle de cette façon. Bouse de dragon ! » Je pris mes affaires, les cours étaient terminés. J'étais furieuse, contre moi, contre lui. Ma fureur amplifia quand je croisa mon frère dans les couloirs. Je levais la tête, hautaine, passant à coté de lui comme si je ne le connaissais pas. Je reçus le soir une lettre de mon père qui me félicita d'être entrée chez les serpents. Mon coeur se gonfla de fierté.

J'ai cru que c'était une plaisanterie. En voyant mon père furieux, j'ai compris que s'en était pas une. Il était parti. Parti avec notre oncle. J'avais treize ans et à ce moment là je ressentis un moment de haine intense. J'étais blessée. Blessée qu'il soit parti, qu'il m'ait laissé. D'accord, je n'avais pas été très sympathique envers lui, mais il n'avait pas le droit de m'abandonner. « Si je le retrouves, il va passer un sale quart d'heure ! » Je ne savais pas s'il parlait de mon oncle ou de mon frère. En tout cas je ne l'avais jamais vu aussi furieux de toute ma vie. J'étais assise sur le canapé du salon, les poings serrés. J'étais en colère, triste. Je n'arrivais pas à définir quelle émotion prenait le dessus sur l'autre. Je pense que c'est cet événement qui a fait que je ne m'attachais à personne. J'avais seize ans quand j'ai été avec mon premier petit ami. Il était à serpentard, tout comme moi. Il s'attachait, de trop et à force je l'ai repoussé. « Pourquoi tu fais ça ? » Je n'avais rien répondu, j'avais pris mes livres et je marchais vite dans le couloir quand il me rattrapa. « A quoi cela te mène ? Je pensais qu'on était bien tous les deux. » « Tu penses mal. » Déclarais-je en le regardant droit dans les yeux, fronçant les sourcils. Il m'avait attrapé par le bras. « Laisse moi tranquille ! » « Attends on s'embrasse et quand je dis que je t'aime, tu me dis que c'est fini ? » « Exactement ! » Je me détacha de lui avant de serrer mes livres contre moi. Il pesta avant de me laisser toute seule dans le couloir. Je sentais mon coeur se serrer. Bien entendu que je l'aimais, mais je ne voulais pas que quelqu'un d'autre me brise le coeur, encore une fois.

Mes études et ma passion pour l'histoire m'a amené à ce que je rêvais : travailler dans un musée. Au fil des années mon cœur s'était légèrement cicatrisé de cette blessure du passé. Je tentais d'oublier, d'oublier cette trahison, d'avoir du grandir seul. A présent, je vivais ma vie, même si mes parents étaient pro-mangemorts et me disaient qu'avec mon intelligence je pourrais y trouver ma place facilement. Je voyais que mon père serait fier mais une part de moi était en pleine hésitation. Je ne savais pas quoi faire. D'un côté, je voulais voir cette fierté, de l'autre ma raison me disait qu'il ne fallait pas céder à ce côté trop sombre de la magie. J'ai donc décidé de prendre mon indépendance. « Pour mieux réfléchir à tout ça. » « Je suis sûr que tu prendras la bonne décision. » Il sourit, me posant une main sur mon épaule. J'ai pris ce petit logement non loin du musée et je ressasse toujours le choix que je dois faire. Puis, mon oncle est décédé. J'ai du aller à l'enterrement. Je l'ai vu. Revu. Je n'ai rien dit, je me suis murée dans mon silence. « Tu as changé. » Il est venu me voir avec ce sourire. C'est à ce moment là que j'ai tranché. « Ne m'adresse même pas la parole. » J'ai tourné les talons. J'ai entendu des brides de conversations de mon père qui disait que sans doute j'allais pendre une future grande décision qui révolutionnerait les mangemorts. Je frissonna. A ce moment-là je me sentis pris par la peur. Dans un tourbillon angoissant. Je suis rentrée chez moi et j'ai fermé les yeux. Qu'est ce que je devais faire ? J'avais par moment l'impression d'être un pantin, qu'on me contrôlait, que ma vie m'échappait entre mes doigts. Cette situation dure depuis deux ans, et encore aujourd'hui je ne sais toujours pas quoi faire. Je me consacre à mon travail mais je sens bien que mon père est impatient de connaître ma décision. Décision dont je suis incapable de prendre.