Bonjour. Bonjour. Bonsoir ? Peu importe. Le mot qui compte est « Bienvenue ».
Je devrais vous demander votre nom, votre situation, comment vous vous sentez, probablement ; mais je suis de ces gens qui savent ce que vous voulez dire avant même que votre cerveau n'ordonne à votre bouche de l'articuler. Mais je ne suis pas impoli, et je ne voudrais pas vous mettre mal à l'aise, alors reprenons cette conversation dans l'ordre naturel.
Vous avez un nom, peu importe lequel, et vous êtes un sorcier, vous devriez l'être, vous l'avez été. Vous étudiez à Poudlard ou travaillez pour le Ministère, vous vagabondez dans Londres ou vous servez des idéaux moins honnêtes que la simple ignorance. Corrigez-moi si je me trompe, voulez-vous ? Non, ne vous embêtez pas, économisez votre salive. Il suffit qu'une idée effleure votre esprit pour qu'elle traverse le mien. Oh, mais aurais-je eu l'impolitesse de ne pas me présenter ? Le nom est « Celui-qui-sait ». La situation est inexistante, et je me sens plutôt bien, je vous remercie de vous en soucier. Ignorer qui je suis est un affront dont même le plus ignorant des imbéciles ne peut se vanter. Faisons-la courte — tu permets que je te tutoie ?
Tout le monde ici bas a quelque chose à cacher. Tout le monde ici bas a quelque chose à cacher. Tout le monde a fait quelque chose, ou au contraire n'a pas fait, tout le monde a pensé quelque chose, tout le monde a un jour de la misérable continuité que forme leur vie eu la pression de craindre d'être percé à jour. Je suis celui qui entretient cette peur, tu vois ? Il y a quelques temps, je pouvais jouer d'un mystère qui entretenait ma discrétion et, ne soyons pas timide, mon indéniable élégance, mais à cause de ce
sale petit cafard de Skeeter, tenter de me cacher est désormais d'une terrible futilité. Je ne suis personne, mais c'est après tout une bonne nouvelle : ça veut dire que je suis tout à la fois. Je ne joue pas sur le tableau politique, trop manichéen à mon goût — je fonctionne sur mon système. Mon influence dépasse ces sphères là, j'aide un camp après avoir aidé son ennemi, je détruis le journalisme comme j'en suis le
meilleur informateur, comme un merveilleux jeu d'équilibre auquel je suis un imbattable maître. Donnant-donnant, tu vois le truc ? Le bon côté serait que si tu ne m'embêtes pas, je ne t'embête pas, mais l'inébranlable loyauté n'est pas dans mes cordes. Alors formulons ça correctement — fais du tort, et je te ferai du tort.
Oh, la mémoire te revient ? Splendide. Tu sais alors
ce qui se passe autour de toi, tu sais pour la mort de Cornélius Fudge, tu sais pour le champ de bataille politique qui s'étend sur le pays. Tu sais que le Ministre est indigne de confiance, tu sais que l'Ordre du Phénix est revenu, tu sais que les Mangemorts s'invitent, que Poudlard n'est pas plus une école qu'un refuge. Tu sais que le Ministère est lancé, que c'est fini, que partout où la vie est, le Ministère est. Tu sais qu'il existe des moyens d'y résister. Tu sais que tu peux faire ce que tu veux tant que tu n'oublies pas que je serai toujours là pour le savoir, pas vrai ? Alors, vas-y, tu peux t'en aller. Je te laisse quelques secondes d'avance.