La nuit était froide encore dans ce coin perdu de l'Ecosse où se trouvait Poudlard. Défiant inexplicablement les éléments, Roxana Diana Wells avait décidé que le mois de mars signait pour elle l'abandon de l'épaisse cape d'uniforme pour un blouson de cuir juste un peu trop grand pour elle. Enfonçant ses poings gantés de mitaines au fond de ses poches, elle trépigna un peu sur place pour se réchauffer, avant de se rappeler une poignée de secondes plus tard qu'elle était, en fait, une sorcière.

« Espèce d'idiote... » Même en marmonnant entre ses dents l'exaspération était audible. S'il y avait bien une chose qui l'exaspérait avec son sang de moldu c'était bien son absence de spontanéité concernant la magie quotidienne. Roxy lança un sort pour se réchauffer, avec un peu trop d'enthousiasme. Jurant des insanités pour le moins colorées – qu'elle avait pu emprunter à sa petite amie – elle ouvrit largement son blouson noir, suffoquée par la vague de chaleur qui l'avait envahi. Roxy était surexcitée. Déjà par l'idée de fuir le château en pleine nuit pour se précipiter à un concert prometteur qui se tenait, une fois n'était pas coutume, à Pré-au-lard. Une occasion unique qu'elle n'allait rater pour rien au monde. Salazar soit loué, elle était tombée en fouinant dans les recoins les moins hospitaliers de Poudlard un passage secret qui débouchait dans la cave de Honeydukes. Elle n'avait pas encore osé l'emprunter, mais aux côtés de Natali, ça ne serait pas un problème.

Roxy chercha une cigarette, un peu nerveusement, dans la poche intérieure de son blouson, depuis peu elle avait besoin d'un peu de calme que lui procurait la nicotine à chaque fois que Natali venait s'imposer à son esprit. Elle se sentait déjà assez nerveuse lorsqu'elles n'étaient que deux filles jouant plus ou moins au chat et à la souris et exaspérant au passage tous leurs amis – Daphné en tête – lorsqu'ils n'étaient pas occupés à les taquiner mutuellement sur le sujet. Et maintenant qu'elles avaient officialisé... Ou l'avaient-elles fait ? A bien y réfléchir Roxy ne se souvenait pas d'avoir ne serait-ce qu'une seule fois admis publiquement qu'elle sortait avec Natali Oliver, s'entourant plutôt d'un nuage de fumée lorsque la question lui était posée de front.

Morgane, mais, est-ce qu'elles étaient ensembles à la fin ? Risenfield avait l'air de penser que oui, étant donné l’écœurante lettre qu'elle lui avait envoyé à la St Valentin, et rien que d'y penser Roxy en frissonnait de dégoût. Oui, parfaitement, de dégoût. Et pas de froid, son charme n'était pas si faiblard que ça. Quelle idée d'être arrivée si tôt à leur point de rendez-vous, derrière cette stupide statue, aussi. S'aplatissant contre la pierre glacée à chaque bruit suspect, Roxy commençait à s'agacer de la situation dans laquelle elle s'était fourrée toute seule comme une grande. Natali allait venir, sans aucun doute, parce que c'était Natali et qu'elle ne manquait pas à sa parole. Un trait de caractère appréciable et terriblement Poufsouffle, mais la blonde n'était actuellement pas en position de critiquer.

Glissant finalement entre ses lèvres la cigarette qu'elle tenait entre ses doigts depuis un petit moment, perdue dans les circonvolutions de ses pensées, elle l'alluma grâce à un sortilège informulé, trop engourdie pour chercher le briquet en argent qui trainait quelque part dans la poche de son jean en lambeaux. Elle se figea soudainement. Un bruit de pas dans le couloir où elle se tenait en embuscade. Un sourire se dessina lentement sur ses lèvres carmin, sourire d'amoureuse transie ou d'idiote prête à un mauvais coup, sourire de gamine surexcitée à la perspective de sortir en pleine nuit pour profiter de l'ambiance d'un concert de rock sorcier. Sortant de sa cachette, elle vint s'adosser à la paroi de pierre, cigarette nonchalamment coincée entre le majeur et l'index, et jeta un regard faussement blasé à la personne qui venait dans sa direction.

« Belle nuit pour faire le mur, pas vrai ? »

Bien entendu, à aucun moment Roxy ne s'était dit qu'elle pouvait tomber sur un préfet consciencieux ou un professeur insomniaque. Grâce soit rendue à Merlin, il y avait un dieu pour les inconscientes.

Tu es aussi surexcitée qu'un soir de Noël, vraiment. La journée était passé avec une lenteur détestable, tu n'avais pas réussi à tenir une seconde en place, incapable de te concentrer sur la pile de devoir qui t'attendait. A la place, tu avais plutôt lu et relu la lettre de Roxy, qui t'invitait. Tu l'avais tellement lu, que tu allais finir par la connaître par cœur, que les mots allaient être usés à force d'être lu, allaient disparaître.

Tu avais bien rangé la place de concert dans le tiroir à côté de ton lit - celui qui ferme avec une clé, et par miracle, tu n'as pas perdu la clé - et dès qu'il est l'heure de te préparer, tu te jettes dessus pour le prendre.
Quiconque te connaît un peu aura bien remarqué l'attention toute particulière que tu as mis dans ta tenue, ce soir. Tes cheveux bruns sont bien coiffés, tu as même été jusqu'à te dessiner un trait d'eyeliner et tu portes une jupe en jean - abandonnant ton pantalon habituel jeté sur ton lit, en vrac. Tu restes quand bien même fidèle à toi même, ton t-shirt à inscription et ce petit chat trop mignon, ton sweat jaune poussin (un hasard, puisque tu l'avais acheté bien avant de rejoindre Poudlard. Le hasard fait bien les choses, tu penses) et tes tennis. Mais quand même, tu n'échappes pas à une remarque de tes camarades jaunes et noirs : « Alors, Natali, on a un rendez-vous? - Pff, non, je vais juste voir Roxy.  » Tu réponds en enfilant une veste, remontant le bord de ton pull sur le bas de ton visage pour dissimuler que toi, Natali Oliver, rougissait à l'idée de passer une soirée avec Roxy.

Tu as le cœur battant alors que tu te faufiles hors de la salle commune pour rejoindre le passage secret. Tu as le cœur battant pour plusieurs raisons ; celle qui te retourne l'estomac, lui fait faire un triple saut périlleux, te fais presque trembler, qui te fait sentir comme une adolescente qui va voir son premier amour – mais c'est un peu ça, non ? - et cette raison s'appelle Roxy. La deuxième raison – un peu moins romantique, plus terre à terre, malheureusement – c'était l'idée de te faire choper hors du dortoir après le couvre-feu. Tu te fais discrète, autant que tu en es possible, alors que tes tennis font sur le sol un bruit légèrement étouffé.
Encore un virage, et tu seras face à la blonde. Ta petite-amie. Enfin, c'est ce que tu as dis à Hazel, après ton aveu du début de l'année. Et puis, il y a la lettre de la St Valentin de Roxy, avec le walkman – que tu écoutes un peu trop souvent, avant de te coucher. On ne manquera pas de te taquiner là-dessus. Et ta fierté mal placée t'empêchera de l'avouer un jour à Roxy, ou uniquement sur ton lit de mort. (Et encore ! tu penses.)

« Pas aussi belle que toi. » tu lâches sans réfléchir, avec un ton presque sérieux. « Enfin, j'dis ça parce qu'on est dans l'ombre, du coup, éclairée par seulement ta clope... V'là quoi. »

Vous ne seriez pas Natali et Roxy si vous ne continuiez pas à vous lancer des piques. Tu te vois mal devenir tout miel et petit-surnom-niais du jour au lendemain, comme ça. Même s'il y a beaucoup de vrai quand tu as annoncé qu'elle était belle – mais là encore, fierté mal placée, quand tu nous tiens..
Tu enfonces tes mains dans les poches de ta veste, te rapproche de la Serpentarde, trépigne sur place alors que le froid s'infiltre sur tes jambes uniquement couvertes d'un collant. Quelle idée de vouloir se faire belle – on était au mois de mars, d'accord, les jours se réchauffaient, mais les nuits, elles...
Tu ne peux pas t'empêcher de sourire quand tu es seule avec Roxy, pourtant. Tu dois avoir l'air bien niaise, mais tant pis.

« Ca y est, tu ne peux plus te passer de moi, tu veux maintenant passer tes nuits avec moi ? J'suis flattée, tu sais.  »

Le même cinéma à chaque fois et Roxy commence à se demander avec une pointe d'agacement si son corps va la trahir lamentablement toutes les fois où Natali apparaîtra dans son champ de vision. Parce que c'est le grand show, il faut le savoir : paumes moites, cils qui frémissent, battements du cœur qui s'accélèrent et cette sensation si particulière dans le ventre, d'avoir avalé des papillons qui mettent à présent le bordel comme c'est pas possible. Et tout ça parce qu'elle se tient là, à peine visible dans la pénombre du château, ses grands yeux bruns à peine discernables et pourtant Roxy s'y plonge, y meurt, en écrase sa cigarette contre le sol sans même chercher à tirer une taffe de plus.

« Je vais faire comme si j'avais rien entendu, mon cœur. » Les surnoms se sont mis à apparaître brusquemment dans leur relation, surtout du côté de Roxy. Toujours teintés de venin, de piquant, de dérision, mais il n'empêche que dans la bouche de la blonde Natali c'est « baby », c'est « darling », c'est « sweetheart ». Et dans sa tête aussi parfois, et là ça devient un peu moins un jeu pour parodier les autres et un peu plus sérieux. Lorsqu'elle promène son regard sur elle, Roxy manque de s'étouffer avec sa salive en voyant les jambes interminables de la brune, c'est avec une bouffée de fierté qu'elle pense que sa « chérie est vraiment canon ». Lamentable oui, et pour compenser elle ne le lui dira pas. Et puis tout de suite après c'est le contrecoup inévitable de la jalousie qui vient frapper à la porte et Roxy Wells qui prétend se foutre de tout et n'en avoir rien à faire de ce que pensent les gens est à deux doigts d'invoquer une cape pour en recouvrir Natali et éviter que des yeux autres que les siens se posent sur elle. Pitoyable.

« Ah. Ah. Ah. » S'il doit y avoir une récompense pour le meilleur faux rire ironique c'est sans doute Roxy qui l'obtiendrait. Ou serait sur le podium, du moins. « Ce qu'il y a de bien avec toi c'est que tu as toujours le mot pour rire, hein ? » La blonde fait de gros efforts pour ne pas trop laisser transparaître l'affection dans sa voix alors qu'elle s'avance, replace une mèche dans la chevelure de la brune. Les papillons dans son ventre sont devenus fous et elle craint pour la sécurité de sa paroi stomacale mais essaie de rien trahir. « Pas trop froid ? » Quelque part dans sa tête une petite voix lui souffle que c'est pour elle que Natali a fait des efforts vestimentaires et elle ne peut qu'en être stupidement contente. Bien que la jupe ne soit peut-être pas recommandée pour aller crapahuter dans les passages secrets de Poudlard.

La blonde lui attrape négligemment la main et se retourne pour passer derrière la statue de Grégory le Hautain, qui décidément a une sale tête, et faire face au trou béant qui doit les mener à l'extérieur du château. « Bon, alors c'est le moment où tu me prouves que tu n'es vraiment pas en sucre, compris ? » Roxy sourit, assurée, un peu narquoise, et se garde bien de révéler qu'elle n'a jamais osé prendre ce passage secret toute seule. Peut-être bien que Natali la rend dingue et incapable de garder son sang froid mais d'un autre côté elle lui apporte de la force et du courage, et Morgane seule sait combien Roxy a besoin de courage parfois.

« Je crois que c'est une sorte de toboggan donc fais attention en arrivant en bas à pas te ramasser, okay? » Il y a même une pointe d'inquiétude dans cette phrase, preuve s'il en fallait que Natali Oliver a réussi à où la plupart des gens se seraient cassés les dents : être suffisamment important aux yeux de la blonde pour la faire se sentir concernée par le bien-être de quelqu'un d'autre. Ce qui n'empêche en aucun cas les moqueries. « La dernière en bas est un Poufsouffle ! ...Oh, Oops, trop tard. » sourit-elle avec délice en plongeant en premier dans l'inconnu.

« Mon cœur » et là, c'est le tien qui s'arrête, loupe un battement, ou même deux, mais toi tu te contentes de rire et passer une main dans tes cheveux, comme si de rien était. Et quelques secondes plus tard, Roxy est à deux centimètres de toi, et tu te demandes vraiment si elle n'entends pas ton cœur qui menace d'exploser à chacun de ses gestes. Est-ce que cette sensation s'arrêtera un jour, laissant place à quelque chose de routinier, et monotone ? En fait, la question est idiote – tu ne te laisserais jamais entraînée dans quelque chose de prévisible et classique. Ce qui explique pourquoi, peut-être, tu aimes tant Roxy.

« Je sais, je sais. Je pensais faire comédienne, après Poudlard, vu tout l'effet que j'ai sur toi avec mes blagues. »

Tu n'as jamais pensé une seconde à faire comédienne, tu laisseras ça à d'autres plus doués – surtout que tu finirais sûrement par engueuler le public si celui-ci ne rit pas à tes blagues. Heureusement, tu as un tout autre projet professionnel.
Si tu as les joues rouges, en revanche, ce n'est pas uniquement à cause du froid. Tu hausses les épaules à la question de Roxy, mais quand elle t’attrape la main, tu rougis. En plus, elle doit bien réalisé que tu as les mains glacées. Tu serres légèrement la main de Roxy entre tes doigts, l'air de rien.

« En sucre ? S'il te plaît, tu me déçois là, tu parles à Natali Oliver quand même. Pas la peine de t’inquiéter pour moi, chérie. » Le surnom glisse de tes lèvres avec un sourire, sourire qui pourrait presque s'entendre dans ta voix.

Tu aurais bien rétorqué quelque chose de cinglant à la Verte et Argent à propos des Poufsouffles, mais celle-ci a déjà disparu à l'intérieur du toboggan. Tu lèves les yeux au ciel et jette un dernier coup d’œil derrière toi – celui qui vous surprendrait maintenant n'aurait plus que deux solutions : se lancer à votre suite dans le passage ou vous attendre à votre retour. Tu croises les doigts pour qu'il n'y ait personne plus tard, et t'élances à la suite de Roxy.

En arrivant en bas, tu manques de heurter la blonde, roule sur le côté pour l'éviter – par Merlin, heureusement que tu as des réflexes, sinon tu aurais probablement renversé Roxy avec la grâce d'une boule de bowling dégommant les quilles.
Si tu étais coiffée avant de rentrer dans le passage secret ce n'est décidément plus le cas. Tu grommelles, râle en te relevant, frotte l'arrière de ta jupe.

« J'espère qu'le passage secret du retour est un peu moins casse-gueule. » Tu attrapes la main de Roxy, plante ton regard dans le sien. « A moins que tu essayes de me tester pour voir c'que j'peux endurer ? » Tu ricannes.

Finalement, ton regard se balade sur la cave d'Honeydukes où vous avez atterri – et cela suffit à réveiller sa gourmandise. Tu t'imagines déjà chiper un ou deux bonbons, ce qui passerait inaperçu... Mais non, Roxy et toi n'êtes pas là pour vandaliser les commerces de Pré-au-Lard, mais pour un concert.
Tu te hâtes déjà vers la sortie en tirant ta petite-amie par la main, avec l'impatience de toute adolescente avant un concert.

« Tu traînes, Wells, on va louper le début. J'pourrais pas t'acheter un t-shirt du groupe si tu traînes comme ça. Et on sera tout au fond, on verra que dalle. »

Natali comédienne ? Ça serait définitivement comique, mais peut-être pas pour les bonnes raisons. En fait, Roxy doit bien être la seule qui trouverait ça hilarant de voir sa copine passer à tabac ou hurler des insultes colorées à un public un peu trop récalcitrant. « Je viendrais t'applaudir tous les soirs alors. » Elle sourit en coin, imaginant un scénario catastrophe où elle se chargerait de jeter la première tomate sur la scène, histoire de déclencher la Natapocalypse. Comment ça, c'est honteux ? Eh, Roxy n'a jamais prétendu être quelqu'un de bien.

La chute – pardon la descente – est parfaitement à l'image de celle qu'elle se faisait : terrifiante et beaucoup trop rapide. Roxy ne se définissait pas exactement comme claustrophobe mais glisser à toute allure dans un tunnel en pierre était en train de la faire se questionner sérieusement. Elle se rappela brièvement de Alice tombant au fond d'un terrier de lapin, pendant des heures et des heures, et cette pensée ne l'aida pas le moins du monde à se distraire de la descente. Après ce qui lui sembla être une éternité, elle rentra pour le moins brutalement en contact avec le sol poussiéreux de la cave des Honeydukes, et se releva avec les jambes un peu tremblantes. Honeydukes. Le Paradis. Roxy tendit une main avide vers une boîte de chocogrenouilles mais avant qu'elle ne puisse la toucher Natali Oliver débarqua avec toute la grâce qui la caractérisait, et se releva avec les cheveux dans tous les sens. Roxy ne put s'empêcher de ricaner un peu, ce qui n'aurait sans doute pas été le cas si la brune lui avait foncé dans les jambes.

Glissant ses doigts entre les siens – et fronçant un peu les sourcils en les trouvant vraiment glacés – elle eut une exclamation indignée. « Moi je traîne ? Allez, jamais de la vie ! » mais le reste de la phrase était une promesse beaucoup trop alléchante pour qu'elle se renfrogne. « Sérieusement ? T'es la meilleure. » Un sourire de gamine frôlant l'hystérie à l'idée de passer une soirée en compagnie des deux choses qu'elle préfère : la musique et sa copine. « Enfin prends pas trop la grosse tête non plus ! »

Elle rit et a sans doute l'air très jeune pendant une seconde ou deux, mais en cet instant précis elle s'en fout pas mal de savoir à quoi elle ressemble, et elle tirerait presque Natali vers l'un des bars de Pré-au-lard qui se transforme pour ce soir en salle de concert. Elle fredonne l'une des mélodies les plus connues du groupe, elle oublie le froid et se laisse réchauffer par l'idée que dans quelques mètres elle sera avec Natali à hurler de tous ses poumons. Le rock sorcier vaut bien le rock moldu, en matière de décibels. C'est bien la seule chose qui réunisse les deux univers, car Roxy aime de moins en moins être une née-moldue, rentre à reculon lors des vacances d'été et se sent frustrée comme jamais lorsque ses parents lui demandent si elle compte trouver un travail « respectable » après ses études. Comprendre un job moldu. Plutôt crever, pense à chaque fois Roxy. La magie est la chose la plus dingue et la plus merveilleuse qui soit, et s'il faut faire un choix entre son monde d'origine et celui des sorciers, ses parents risquent d'être bien déçus.

Le blonde pousse la lourde porte de ce qui semble être un petit bar un peu miteux d'où s'échappe déjà quelques accords de guitare et où toute la population de jeunes adultes de Pré-au-lard semble s'être donnée rendez-vous.

« Waow, le monde ! » Peut-être, oh, de façon très hypothétique bien sûr, que Natali avait raison de s'inquiéter de leur place. Heureusement pour elles qu'elles étaient plus grandes que la moyenne, la salle était presque entièrement pleine, et la scène était loin. Et c'était donc bien évidemment pour cette raison que Roxy continuait de tenir la main de la brune. Pour éviter de se perdre. Parce qu'il y avait du monde. Voilà. « On se rapproche ? » C'était plus une affirmation qu'une question, étant donné que la blonde était déjà en train de tirer sa compagne en direction du premier rang.

C'est un grand sourire qui s'étale sur ton visage quand Roxy affirme que tu es la meilleure. Bien évidemment, tu sais que tu es loin d'être réellement la meilleure dans tout les domaines , mais la confirmation de la part de Roxy a bien plus d'importance que celle de n'importe qui d'autres. Pour un peu, tu en aurais le rouge aux joues et le cœur battant – attends une seconde... Non, trop tard, c'est déjà le cas.

« Oups, trop tard, ça y est. Je vais m'en souvenir et m'en servir contre toi, tu le sais ça ? »

Mais tu n'as pas trop le temps de t'attarder sur le sujet que déjà Roxy t'entraîne, Roxy et toi vous hâtez vers le bar. Au moins, tu l'as prévenu: tu lui rappelleras, dès que l'occasion se présentera, que tu es une petite-amie formidable qui offre des t-shirts des groupes. Il y en a qui rêverait d'avoir une petite-amie comme ça et Roxy ne réalise peut-être pas la chance qu'elle a de t'avoir, d'ailleurs.

Roxy fredonne sur le chemin, et tu repenses à la cassette qu'elle t'avait enregistré pour la Saint Valentin – si tu avais un peu moins de fierté, tu lui demanderais un concert privé, juste pour le plaisir de voir ta petite amie chanter pour toi, et toi seule.
Ce n'est pas ton premier concert – tu te souviens d'avoir été à quelques petits concerts en Australie – mais c'est ton premier en Angleterre, et surtout, c'est ton premier accompagnée.
Tu suis Roxy, le pas rapide, lorsqu'elle pousse la porte du bar – pendant quelques secondes, tu te demandes si c'est le bar le plus pourri de Pré-au-Lard, mais une fois à l'intérieur, tu changes bien vite d'avis. C'est sûrement « le » point de rendez-vous de la soirée, au vue de la population qui s'amasse devant la scène et le bar, jeunes adultes et un peu moins jeunes. Heureusement, du haut de ton mètre soixante-quatorze, tu culmines au dessus de la tête de la plupart des gens – et Roxy aussi, puisque vous êtes toutes les deux dans le genre grande perche. Mais celle-ci t'entraîne déjà vers le premier rang, tu la suis sans attendre.

« Au pire, je pourrais toujours te porter sur mes épaules ! » tu glousses, par-dessus le brouhaha et gardant fermement la main de la blonde entre la tienne alors que tu te frayes un passage. Tu jettes un coup d'oeil à la hauteur de plafond qui ne permettrait pas à Roxy de tenir sur tes épaules, et ricane. Dans un festival, peut-être, mais pas dans un bar de Pré-au-Lard, non.

Une fois au premier rang, tu trépignes, jette des regards à droite à gauche, et passe un bras autour de la taille de Roxy – par mesure de sécurité, pour ne pas la perdre, mais aussi pour annoncer clairement au monde que la blonde à côté de toi est ta petite-amie. Loin de Poudlard, des commérages et des remarques des autres élèves, tu te sens pousser des ailes et tu ne te caches pas.

« Si tu veux, j'pourrais t'offrir à boire tant que j'y suis – vu que je suis majeure. » Tu profites de ton statut de majeure par rapport à Roxy – merci le redoublement, qui te permets d'avoir dix-sept ans avant tes camarades de sixième année - quand bien même tu ne doutes pas que celle-ci soit parfaitement capable si elle le voulait, de s'offrir un verre toute seule, en jouant de sa grande taille et son maquillage.

En arrivant près de la scène où les instruments sont en train de s'accorder tout seul - la musique magique, ce cadeau des dieux - la blonde se laisse aller à un vrai éclat de rire en entendant la proposition de Natali.

« Sérieusement ? Tu veux que je m'assomme avoue le ! » Et Roxy de jeter un regard éloquent au plafond crasseux et terriblement bas, comme tous les pubs de Pré-au-lard. Elle croit d'ailleurs déceler un endroit où la peinture se craquelle, et, oh non, c'est juste un liquide brun rouge qui a aspergé le coin. Mortel. Heureusement pour elle que Roxy n'est pas du genre à rechercher la propreté et la bienséance.

Sursautant à peine lorsque Natali passe un bras autour de sa taille, elle lui jette un regard en coin, par-dessous ses cils poisseux de mascara, et un sourire agite le coin de ses lèvres.

« Un peu trop généreuse, Oliver, je vais commencer à m'inquiéter... » Remarquez, elle ne refuse rien. Mais accepter de trop bon cœur, malgré la joie hystérique qu'elle ressent, serait un peu trop en dehors du personnage. Pourtant elle pourrait, devrait. A Poudlard, les choses sont encore un peu hésitantes, de la part de la blonde en tout cas. Assumer n'est pas compliqué, tant qu'elle se répète que choquer est le but premier de son existence. Mais, ce n'est pas ça, plus ça. Il s'agit de Natali, pas d'une fille quelconque, et ça rend tout tellement plus compliqué. A Poudlard, les choses sont empreintes de gêne. Mais ici, dans l'ambiance survoltée de la salle, rien n'est gênant ni hésitant. Roxy peut savourer la présence de la plus belle fille du coin qui la serre possessivement et passer un bras autour de ses épaules, l'air de rien.

Histoire de juste signaler, oh, juste comme ça, que le premier ou la première à poser ses yeux sur elle aura des comptes à lui rendre. Roxy gère très mal sa jalousie, elle qui pensait être trop détachée, trop indifférente, pour y être confrontée. Le fait est qu'elle n'est apparemment différente en rien de toutes les gamines de son âge qui aimeraient pouvoir fusiller tous ceux qui s'approchent de leur petit copain. Elle serait même pire. Serpentard, voyez-vous, justifie la fin et les moyens. Mais l'heure n'est pas à penser à toutes les menaces qui pourraient la séparer de la brune – et d'ailleurs existent-elles seulement ces menaces ? - car les musiciens arrivent sur scène et Roxy hurle en même temps que les autres, sautant sur place alors que les premières notes annoncent une mélodie endiablée qui lui fait penser au mélange improbable de Blur et des Rolling Stones, avec peut-être un soupçon des New York Dolls. Le verre de whiskey pur-feu devra attendre, Roxy Wells a embarqué dans le premier wagon direction le nirvana musical. Le groupe n'est même pas si bon que ça, pas aussi bon que les divinités qu'elle adore, mais l'atmosphère surchauffée lui suffit.

Elle tourne ses yeux vers sa petite amie, sourit comme si elle allait en mourir, et c'est peut-être ça qui se passe, mourir de bonheur, quelque chose de très nouveau dans sa vie, et glisse sa main dans la sienne, s'autorisant à une sentimentalité très Poufsouffle.

Les premiers accords, les voix s'élèvent pour dire « enfin ! Il était temps que ça commence ! » et bien vite, tous se laissent emporter, trip collectif sans drogue – ou la musique comme stupéfiant. Mais toi, tu te laisses emporter surtout par Roxy, Roxy qui t’adresse un sourire pour lequel tu pourrais crever. Un sourire à t'en refaire tomber amoureuse, un sourire que tu graves dans ta mémoire pour les cents semaines à venir : Roxy qui sourit, qui te prends la main, la musique dans tes tympans, ton cœur qui bats à tout rompre au rythme de la batterie. Tu réponds d'un grand sourire, à t'en faire mal aux joues – tu es tellement heureuse ce soir, il en faudrait beaucoup pour te décoller ce fichu sourire, ce sourire d'idiote qui va d'une oreille à l'autre.


Tu serres les doigts de ta blonde de petite amie, tu te retrouves à taper du pieds en rythme, chantonner discrètement des paroles que tu ne connaissais pas avant ce soir. Tu n'es peut-être pas aussi calée en musique que Roxy, mais elle n'avait pas tort en disant que ça te plairai.

Tu foudroies du regard ceux qui s'attarderaient un peu trop sur ta petite amie – si leurs regards sont insistants ou juste curieux, tu ne fais pas la différence et leur offre ton regard le plus méchant possible. Tu veilles aussi tout particulièrement à ce que personne ne se glisse entre vous deux dans une tentative de s'approcher de la scène. Et un regard pour ce garçon, là-bas, dont les yeux détaillaient Roxy de haut en bas ! Jalouse, toi ? Absolument pas. Possessive ? Carrément.


Alors qu'il y a une pause entre quelques chansons, tu attires Roxy vers le bar, pour ce verre que tu lui a promis. Tu sors de tes poches les quelques pièces nécessaires, t'appuies au bas comme si tu étais une habituée.

« Deux whisky-pur-feu ! » tu te penches et hausse un peu le ton pour te faire entendre par dessus le brouhaha ambiant. « Tiens. »

Tu tends le verre à Roxy, trempe les lèvres dans le tien, alors que ton regard parcourt la salle. L'ambiance te plaît, tu te sens bien – surtout que tu as Roxy tout à toi, tu es presque le centre de son attention. Enfin, quand il n'y a pas la musique, bien sûr.

« T'avais raison, ça me plaît trop ce concert. Tu me connais trop bien, c'est presque flippant. » tu ris – en fait, l'idée que Roxy te connaisse si bien est plutôt touchante. Tu poses ton verre à côté de toi, attire Roxy par la taille, avec un sourire. Cette soirée est décidément la meilleure soirée depuis... depuis la dernière soirée que tu as passé avec Roxy. C'est niais – mais toute les soirées passées avec Roxy sont tes préférées. Heureusement qu'elle ne t'entends pas penser ça, ça te retomberais dessus.

Roxana Diana Wells a depuis longtemps compris qu'on peut se construire et se reconstruire comme un jeu de mécano infini, tout est question d'un peu de temps et d'une bonne coupe de cheveux. C'est peut-être en voyant Cherrie Curie sur la pochette d'un album vinyle des Runaways qu'elle a décidé de voir le monde autrement. Il s'agit de choisir avec précision la bonne paire de lunettes à travers laquelle on voit le monde. Et Roxana Diana Wells ce soir a enfilé sa panoplie de mauvaise fille, de sale engeance, elle secoue ses cheveux décolorés, peroxydés, un éclair blond platine dans la nuit du bar, les piercings cliquetant à ses oreilles, elle tape du pied et des mains : ce soir elle est plus Roxy que jamais.

Elle dévore la scène des yeux, avec l'impression que les battements de son cœur s'accordent parfaitement avec la ligne de basse. Pendant quelques minutes honteuses elle en oublie où elle est, avec qui elle est, pour ne plus faire qu'un avec la foule, la musique. Natali le sait de toute façon, que Roxy est une fille qu'il va falloir partager. La blonde dort tous les soirs avec David, prend sa douche en pensant à Kurt, et partage son lit avec Joan et Patti. Un amour en deux dimension, pour des vinyles et de leurs pochettes tapageuses mais un amour qui prend de la place.

Heureusement pour Natali, elle a l'avantage d'être plus concrète qu'une rock star et de savoir qu'elle aime le whiskey pur feu. La musique s'arrête et Roxy se retrouve accoudée au bar, à sourire en coin à sa copine, un peu essoufflée, le rouge aux joues d'avoir trop gesticulé.

« Attends un peu que je sois majeure et je pourrais te payer à boire en toute légalité. »

Et Roxy de siroter l'alcool fort comme s'il s'agissait d'une grenadine, ignorant la brûlure familière qui attaque sa gorge. Elle pose son menton dans sa main, observant la brune, cherchant chez Natalie l'enthousiasme qui lui prouverait qu'elle a bien fait de l'emmener ici. Et Salazar soit loué, l'enthousiasme est là ! Roxy rit un peu, secouant la tête.

« Pur hasard, je te le promets. Crois pas que je retiens ce que tu aimes. »

Comme si ça n'avait pas déjà été établi que Roxy possède une section entière de sa mémoire étiquetée sous Natali. Il faut bien faire semblant d'avoir de la dignité, que voulez-vous. Mais malheureusement, toute intention de se montrer digne s'évapore lorsque la Poufsouffle passe un bras autour de sa taille, Roxy suit le mouvement en entourant son cou de ses bras. Elle se penche pour - oh, très probablement l'embrasser - mais s'arrête lorsqu'elle entend un sifflet moqueur, tourne la tête pour apercevoir un garçon un peu plus vieux qu'elles qui les regarde et semble glisser un commentaire libidineux. Roxy n'entend pas, trop de brouhaha, mais elle fusille du regard l'imbécile, frustrée d'avoir été interrompu.

« Ça va le gros naze, tu veux notre photo tant que tu y es ? » Et son bras autour des épaules de Nat se resserre, pas pour protéger mais pour éviter que la brune n'aille refaire le portrait du mec en moins de temps qu'il n'en faut pour dire coup de poing. C'est ça de sortir avec une fille qui a le sang chaud.

Tu te sens légère, joyeuse, enivrée par l'ambiance survoltée de la salle, par la présence de Roxy et probablement tout à l'heure par l'alcool, maintenant que tu as un verre dans la main. Le combo idéal pour une soirée réussie – tu n'en as aucun doute.

« Mais en attendant, c'est moi qui te paye les verres. Tu te rends compte tout les verres que tu vas devoir m'acheter pour me repayer ça ? » tu lâches en riant. C'est pas comme si ça te faisait plaisir d'offrir des choses à ta blonde, non.

D'ailleurs, c'était presque aussi crédible que Roxy ne connaissant pas tes goûts. Cette fille retenait ce que tu aimes plus vite que tes propres parents : c'était dire. Mais tu fais comme si tu y croyais, comme si ce n'était qu'un heureux hasard, une coïncidence qui tombe parfaitement bien. Tu laisses à Roxy un semblant de fierté : fierté qui disparaît quand tu l'attires contre toi et qu'elle suit le mouvement.

Les bras de Roxy autour de ton cou, ça t'enflammes, tu as des une armée de papillons qui s'agitent dans ton estomac, tu es à deux doigts de l'embrasser et visiblement, Roxy à la même idée. Ton cœur bats à tout rompre à chaque fois que les cheveux de Roxy chatouillent des joues quand elle se penche vers toi, à chaque fois que tu peux remarquer toutes les nuances de couleurs dans ses yeux et - -

Un sifflement vous interromps dans votre geste, tu sens Roxy qui resserre son étreinte autour de toi, mais c'est déjà trop tard : tu as glissé sous son bras, tu n'entends pas la réponse de Roxy parce que tu bouillonnes. Pas facile d'être la fille qui démarre au quart de tour – enfin, pas facile pour les autres surtout.
Là, tu serres les poings à t'en faire blanchir les articulations alors que tu te plantes face au garçon en question. Merlin merci, tu es grande, et tu fais presque la même taille que lui, sinon, tu aurais eu l'air ridicule. Tu te plantes là, et on sent que tu es à deux doigts d'écraser ton poing dans l'air suffisant que l'imbécile affiche – visiblement très satisfait de te voir énervée. Tu le toises de haut en bas.

« T'as un problème, espèce de connard ? Continue tes commentaires et j'te fous mon poing dans ta tête de gros con.  »

Tu as les bras croisés devant le mec qui se fout ouvertement de ta gueule, comme si tu n'étais pas capable de l'entendre – et ça, ça t'énerves encore plus que tout le reste. Il ricane avec ses amis et tu meurs d'envie d'utiliser tes muscles pour le remettre à sa place. Bon, si tu fais ça, tu prends le risque de te faire virer du bar et d'interrompre la super soirée que tu passais avec ta petite amie. Dilemme.

Tu inspires, lui lances un dernier regard noir avant de lui tourner le dos pour te rasseoir. Ça vaux mieux, pour ta soirée, pour Roxy, pour le visage du gars. Et là, tu l'entends rajouter quelques chose, et c'est plus fort que toi. Tu fais volte-face et tu lances ton poing dans le nez du garçon. Oups.

Quelque part, elle aurait dû le savoir. On ne passe pas deux jours avec Natali Oliver sans savoir qu'elle s'enflamme pour un rien, alors deux ans ? Non, vraiment, Roxy aurait dû pressentir l'esclandre. Qu'on soit bien clair : ça l'amuse plus qu'elle ne voudrait l'admettre, de pouvoir pousser les bons boutons pour faire sortir la brune de ses gonds, de la voir à deux doigts de se jeter sur elle, retenue uniquement par les derniers brins de conscience. Enfin, ça l'amusait. Désormais elle manque d'excuses pour faire tourner en bourrique la jaune et noir, et croyez bien que ça la désole profondément.

Mais de voir quelqu'un d'autre faire ça ? Non, rectification : de voir un pauvre arriéré boutonneux se permettre de rendre sa petite copine folle de rage ? Pas drôle du tout. Et même si Roxy éprouve une satisfaction certaine en voyant le mec se prendre un coup de poing dans sa sale face, elle ne peut s'empêcher d'éprouver un sursaut d'indignation.

« Nat ! »

Dommage, souffle une petite voix mesquine au fond de sa tête, dommage, ça avait si bien commencé. L'abruti se tient la joue en regardant Natali avec stupeur et la blonde a la vague impression qu'un silence pesant s'abat sur la scène pendant quelques millisecondes. Bien entendu c'est juste un effet de son imagination débordante, ils sont peut-être une dizaine au maximum à avoir assisté à l'embryon de bagarre, mais un sorcier qui doit avoir du sang de troll les fixe de derrière le bar. Ouch. Roxy boit son whiskey Pur Feu d'une seule traite - plutôt que d'être tentée de le jeter au visage de l'ahuri – et tire pratiquement sa volcanique petite amie par la main.

« Booon, on s'est tous bien marré, pas vrai ? Maintenant on va tous faire un pas en arrière et respirer à fond, d'accord ? »

Se faire mettre sur la liste noire du seul pub de Pré-au-lard qui accueille des groupes décents ? Même pas en rêve. Malheureusement le mec semble décidé à jouer son rôle de trou du cul jusqu'au bout et commence à hurler comme une banshee qu'il va « se la faire celle-là » et autres joyeusetés, au point où le sorcier-troll derrière son comptoir s'approche avec la visible intention de tous les foutre dehors. Pshah. Même pas en rêve ! Passant un bras autour de la taille de Natali, Roxy lui souffle à l'oreille.

« C'est l'heure de filer en douce, baby. Rock'n'roll. »

Et de l'entraîner à sa suite sur les côtés, pour se fondre dans la masse et finir par se cacher à l'autre bout de la salle, s'accroupissant un peu, en pariant sur la paresse du sorcier à face de troll qui a sûrement mieux à faire que leur courir après. Probablement.
Cette escapade est en train de virer à la catastrophe pour un tas de raisons, mais heureusement, le whiskey monte à la tête peroxydée de la blonde et elle enfouit son visage contre l'épaule de Natali en gloussant.

« Salazar, on a intérêt à faire les ninjas si on veut s'en sortir ! »

Le spectacle devait être hilarant tu penses. Enfin, surtout pour un avide de bagarre de bar, surtout pour quelqu'un pas du tout concerné par tout ça, car pour toi, ça n'est absolument pas amusant. Tu enrages, tu bouillonnes, et le coup de poing que tu viens d'envoyer dans la tête du boutonneux, de cet abruti ne t'as absolument pas calmé. Au contraire ! Tu as maintenant l'envie dévorante de le défier dans une vraie baston qui se finira pour lui ou pour toi par un allé à l'infirmerie, ou pire, à Ste Mangouste directement. Déjà, tu serres le poing, t’apprêtes à lui filer la correction de sa vie – celle qui le fera retourner dans les jupes de sa mère, honteux d'avouer qu'il s'était fait botter le cul par une fille – mais heureusement, il y a Roxy.

Roxy t'attrapes la main et te ramène à la réalité : tu es loin d'être sur un ring de catch, non, tu es en plein milieu d'un bar, à la meilleure soirée de l'année, avec la meilleure des petites amies et tu es à la limite de réduire ce bon moment en miette à coup de pieds et de mains. Tu remarques à peine le regard du troll-sorcier que déjà, ta blonde t'arrache au combat et aux cris de goret de l'énergumène. Tu es encore sonnée par la colère, la situation passe au dessus de toi comme un avion de croisière. Tu remarques à peine que Roxy te chuchote à l'oreille, car tu foudroies encore des yeux ton adversaire. Si tu le revois un jour, celui-là...

Puis, tu t’accroupis avec Roxy, à l’abri des jambes des gens qui vous couvrent, loin des regards – vous passez inaperçues, le sorcier qui ressemble à s'y méprendre à un troll vous a sûrement perdu de vue. Tu soupires, appuie son front contre l'épaule de Roxy et emmêle tes doigts entre les siens. Tu ris d'un rire nerveux, tu commences à retrouver le contrôle de tes émotions.

« Je propose qu'on rampe jusqu'à la sortie. Ou qu'on transplane. Attends, je sais plus si j'ai le permis pour transplaner. » L'alcool t'es monté à la tête, comme à celle de Roxy visiblement, tu glousses bêtement en t'imaginant ramper à travers le bar pour atteindre la porte de sortir.

Tu en profites pour déposer un bisou sur le haut du crâne de ta petite amie – piteuse manière de te faire pardonner de raccourcir votre soirée de rêve. Maudit soit ton caractère tout feu tout flamme.

« Désolée de m'être énervée. Mais ce p'tit enculé de m.... Bref. Désolée. » tu abrèges, avant de raviver ta colère qui couve encore.

Tu te redresses légèrement, vérifiant les environs, juste pour croiser le regard du sorcier-troll. Gloups. Tu relèves Roxy par la main, l'entraîne vers la sortie en te frayant un passage à travers le reste des gens du bar.

« Mauvaise nouvelle. On a un troll à nos trousses. Je pense qu'on devrait filer, à l'anglaise, ou de n'importe quelle manière d'ailleurs. Et vite. »